Authentique charlatan ?
Je crois qu'une des clefs pour comprendre le récit est la manière dont Raju devient guide touristique.
Le bougre, certes, n'y connaissait rien initialement, et a menti pour se hisser à sa position ; mais, reste qu'il finit bien vite par devenir un véritable guide, rusé et compétent, qui connait suffisamment la ville pour répondre aux désirs de chacun et a assez bien retenu les histoires que les uns lui ont racontées pour les ressortir aux suivants.
Raju n'avait donc pas plus l'intention de devenir guide touristique que spirituel. Mais les circonstances, la bêtise humaine et la plume de Narayan le posent là. Et il endosse son rôle, sans s'en rendre compte au début, puis bien content des avantages que cela lui procure, et, enfin, prêt à se sacrifier pour s'élever à la hauteur des attentes de sa communauté. Entre temps, Raju a dispensé des conseils - par lambeaux, certes, un peu pythiques, certes, mais qui font leur effet.
Le livre pose une question qui est intéressante à examiner à la lumière de notre société actuelle : qu'est-ce qu'un guide, sinon quelqu'un qui est suivi ? (Cette question remarquablement pertinente, c'est en fait moi qui la pose ; mais passons). On ne va pas aller chercher du côté du Führer (littéralement, le guide), qui était peut-être à l'esprit de l'auteur au moment d'écrire le livre ; mais on peut se servir de ce conte comme d'une parabole pour penser notre rapport aux réseaux sociaux, dans lesquels on n'a de cesse de "suivre" des gouroux que l'on va se débusquer.
Et si l'on pense ce rapport selon les clefs proposées par Le guide et la danseuse, que voit-on ? Et bien, votre blogueur.euse préféré.e n'a pas plus de raison que Raju d'être votre guide ; il ou elle peut d'ailleurs très bien être un.e ancien.ne forçat. Mais si le guide n'est considéré que pour la parole qu'il délivre, alors son message peut être reçu tout pareillement. Et je ne dis pas ça parce que je suis, actuellement, en position de guide, non non.
Enfin.
Si Raju se révèle au final plus guide qu'escobard, c'est tout de même une métamorphose surprenante vu sa personnalité ; et, tout au long du roman, on n'a de cesse de penser qu'il va, comme l'auraient fait une grande majorité dans sa position, profiter de la situation.
Morale ? Faites comme vous voulez, c'est moi qui vous le dis.