Eva Kopp : L'enfant du tsunami

29/01/2019

Un roman chorale de part et d'autre de la vague

L'auteure

 Eva Kopp est une auteure française née en 1981. Elle a publié un premier roman, L'enfant du tsunami, et est par ailleurs animatrice de radio, illustratrice, infographiste et rédactrice dans la presse quotidienne régionale. Vous trouverez ici un entretien avec l'auteure

11 mars 2011

Tout commence le 11 mars 2011, lorsqu'un séisme au large des côtes du Japon provoque un tsunami qui s'abat sur le pays et provoque, entre autres, l'accident nucléaire à la centrale de Fukushima. Tout, c'est-à-dire l'histoire dont traite le livre, mais aussi le désir d'écrire d'Eva Kopp.

La vague qui balaie le pays le divise aussi, entre une zone sinistrée et que l'on se met à craindre, et la capitale où des vaguelettes de panique ébranlent insidieusement la vie de chacun et répandent les embruns de la peur. L'enfant du tsunami, c'est un petit garçon, Néthanel, rescapé des flots et envoyé en France à son oncle Achille - qui doit faire face à la disparition de sa soeur en même temps qu'à l'apparition d'un enfant imprévu. Sa conjointe, Maïwen, reçoit la nouvelle avec sérénité, et le couple adopte avec souplesse la vie de jeunes parents, prêt à faire face à de nouveaux problèmes. Au programme : s'occuper de l'enfant, faire une croix sur son propre sommeil, comprendre les traumatismes de Néthanel - sa peur bleue de l'eau, par exemple, stigmate laissé par la catastrophe.

En parallèle de ces Parisiens qui vivent le tsunami à travers la télévision, le roman narre la vie de plusieurs Japonais au lendemain de la catastrophe. Des couples se forment, se dissolvent, dans un balai chaotique mais serein, qui donne à comprendre qu'au lendemain d'une catastrophe, la vie suit son cours, comme elle peut. Ainsi, un grand-père, Kiyotane, enfile une combinaison de protection pour travailler à l'assainissement de la centrale nucléaire, guidé par la conscience que les générations futures ont besoin que les anciens réparent leurs erreurs.

Les histoires se mêlent, s'entrecroisent, et dessinent finalement une fresque complexe et cohérente, qui permet de saisir les modifications d'une catastrophe sur la vie de gens ordinaires.

Reportage et impressions

Si le roman fournit un assez grand nombre d'éléments d'information intéressants, c'est en partie parce qu'Eva Kopp a fourni un long travail de recherche avant de le publier, croisant documentation et rencontres, pour essayer de s'approcher d'une réalité dure à appréhender.

C'est d'ailleurs l'impression que donne la diversité des personnages, et les chapitres extrêmement courts - peut-être parfois un peu trop : le livre a vocation romanesque, mais aussi documentaire. On trouve des détails techniques : "Souvent, au début Kiyotane avait très mal à la tête lorsqu'il allait sur le chantier avec le masque. Il pensait que c'était normal... Puis son chef lui a fait remarquer qu'il serrait trop son masque. Une erreur de débutant. La peur que les radiations ne se glissent par les interstices..." Parfois, les détails relèvent de l'anecdote scientifique : "La cour de l'école a été nettoyée en grattant 20 cm de surface. Tout autour, des packs de bouteille d'eau. De simples bouteilles d'eau pour protéger les enfants. De l'eau à ne surtout pas boire. Bien sûr que non. Il s'agit de bouteilles d'eau-bouclier du rayonnement. D'après les mesures de l'école, elles réduisent le rayonnement d'un tiers." Le roman rapporte aussi quelques fragments plus sociologiques, qui montrent la division qui s'est créée au sein de la société japonaise :"Je ne veux pas faire ma vie avec une personne qui a vécu à Fukushima", annonce un personnage à un autre au moment de leur séparation.

Du point de vue littéraire, la phrase d'Eva Kopp est marquée par des caractéristiques récurrentes, et divisera donc ceux qui apprécient de ceux qui s'en seront lassés : propositions courtes, multiples apostrophes au lecteur, recours fréquent au point de suspension, effets de redondance et d'emphase.

Il faut pointer une certaine recherche de l'effet de style, qui est parfois maladroit mais fait éclore en plusieurs occasions des propositions intéressantes. Ainsi, le temps qui passe peut être mesuré à l'évolution du tableau qui décore le bureau du conseiller pour enfants que consulte le couple : de "Une reproduction de Magritte est accrochée au mur. Il s'agit de Golconde : une pluie d'hommes au chapeau melon tombant sur une ville d'immeubles blancs au toit rouge" à "La reproduction de Magritte a disparu. Désormais c'est une affiche d'un tableau surréaliste de Dali qui est accrochée au mur", pour finir par "La reproduction de Dali a disparu, laissant place à son empreinte sur les murs légèrement jaunis".

Il est intéressant, pour chercher du côté des influences de l'auteure, de considérer le rapport (affiché) que l'auteure entretient avec Haruki Murakami et Bernard Werber : une tendance à accepter une grande part de spiritualité, une porosité entre le monde réel et celui des légendes (en témoigne l'apparition d'un renard à neuf queues devant l'un des personnages, par exemple), le goût aussi pour le roman choral et la tendance à insérer des fragments factuels, presque documentaires, au milieu d'une narration souvent touffue.

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