Wilkie Collins : La pierre de lune
L'auteur
Note : Roman lu en anglais, dans son titre original : The Moonstone. Les traductions sont donc de mon propre cru.
Wilkie Collins est un romancier anglais qui a vécu entre 1824 et 1889 ; il a été un grand ami et rival de Charles Dickens, dans l'ombre duquel il a vécu pendant une partie de sa vie. Extrêmement prolifique, il est l'auteur de 27 romans, plus de 50 nouvelles, 15 pièces de théâtre et au moins 100 essais. Il a joui d'une immense notoriété, notamment grâce à ses romans La pierre de lune (1868) et La femme en blanc (1860).
Résumé
La pierre de Lune est une des premières fictions policières telles que nous les connaissons aujourd'hui. On y retrouve donc le schéma classique d'un crime (le vol d'un diamant indien) sur lequel on mène une enquête qui connaît son lot de rebondissements pour finalement désigner un coupable inattendu. Je ne veux pas gâcher le roman, aussi je tairai le nom de ce dernier.
Un diamant indien (la Pierre de Lune) volé dans un temple, réputé pour attirer le malheur à ses propriétaires, est offert à la jeune Rachel Verinder pour son 18ème anniversaire. Seulement, moins de douze heures après que celle-ci découvre son cadeau, la pierre disparaît. L'enquête, qui se déroule tout au long de ce volumineux ouvrage, nous fait explorer diverses pistes, soupçonner tour à tour plusieurs personnages, et fait apparaître plusieurs enquêteurs, certains pitoyables, d'autres impressionnants de bon sens et de déduction (le sergent Cuff).
La particularité de ce roman est que les narrateurs sont multiples : le récit est partagé en 13 épisodes, écrits par 10 personnages différents, chacun ayant sa propre voix. C'est sans doute d'ailleurs là où Collins brille particulièrement : il a réellement réussi à donner à chaque narrateur sa voix, son esprit, ses réflexions.
La majorité de la narration est effectuée par Gabriel Betteredge, le servant de la maison, qui est un personnage que j'ai personnellement adoré. Extrêmement drôle, bon et juste, ancré dans des principes désuets, il est tout particulièrement touchant. Le véritable culte qu'il voue au roman Robinson Crusoe, qu'il chérit plus qu'une Bible, est vraiment hilarant ; il ne cesse d'exposer ce qu'un autre des protagonistes appelle la "philosophie de Betteredge", qui oscille entre bon sens conservateur et mysoginisme profond.
A retenir
Un roman policier dont la narration est partagée entre plusieurs personnages, ce qui permet une grande diversité de points de vue.
Wilkie Collins souffrait de la goutte, et consommait beaucoup d'opium pour se soulager de la douleur ; il a admis que les hallucinations que provoquaient son traitement étaient telles qu'il ne se souvenait pas avoir écrit la majeure partie du roman.
Points positifs
Beaucoup d'humour, d'ironie, de scènes très amusantes ; une enquête au schéma narratif très soigné, et qui semble parfaitement cohérente. Des personnages très intéressants, tous extrêmement crédibles, avec une réelle profondeur psychologique.
Les différents narrateurs ne cessent d'interpeller le lecteur (voir citations), ce qui rend la narration particulièrement chaleureuse et agréable.
Point négatif
Quelques longueurs par moments : toutes les scènes sont extrêmement détaillées, le récit avance donc assez lentement.
Citations
Voici l'essentiel de ce que j'ai dit, écrit entièrement pour votre bénéfice. Prêtez-y attention, ou vous serez perdus quand nous irons plus profondément dans l'histoire. Faîtes sortir de votre esprit les enfants, le dîner, le bonnet, ou je ne sais quoi encore.
"Si vous prêtez attention à ce qui est autour de vous (ce que la plupart des gens ne font pas)," dit le sergent Cuff, "vous remarquerez que les goûts d'un homme sont aussi éloignés que possible de ses activités."
Mais c'est une de mes maximes que les hommes (étant des créatures supérieures), doivent aider les femmes - quand ils le peuvent.
Quand une femme essaie de vous faire sortir de votre calme, échangez les rôles et faites-la sortir de son calme.
Il n'y a que dans les livres que les détectives sont supérieurs à la faiblesse de commettre une erreur.
Je suis le plan adopté par la Reine quand elle s'adresse au Parlement - c'est à dire, le plan de dire à peu près la même chose chaque année.