George Orwell : Dans la dèche à Paris et à Londres

01/04/2015

Je précise avant toute chose qu'ayant lu ce livre en anglais, certains éléments peuvent avoir été mal interprétés et que j'ai traduit personnellement les citations.

Présentation et résumé

George Orwell est surtout connu pour deux œuvres, 1984 et La ferme aux animaux, qu'il a publiées presque en même temps, l'un en 1949, l'autre en 1945 ; cependant, ces deux ouvrages, romans critiquant les totalitarismes chacun à sa manière, ne reflètent pas l'ensemble de la vie de l'écrivain et journaliste anglais.

Né en 1903 et mort en 1950, il connut les deux Guerres Mondiales, découvrit ce qu'étaient les totalitarismes, et mourut peu après le début de la Guerre Froide ; ses deux œuvres les plus célèbres sont très marquées par cette période, et on a tendance à penser qu'il n'a écrit que des romans complexes, possédant plusieurs niveaux de lecture et ne dévoilant ses secrets qu'au lecteur averti.


Dans la dèche à Paris et à Londres (Down and Out in Paris and London, en anglais) ne relève pas de la fiction - on aimerait le croire, pourtant : il raconte dans cet court roman ses années d'extrême pauvreté, d'abord à Paris, puis à Londres, décrivant la condition de vie des vagabonds pour qui, tout comme lui, la vie ne relevait que de la survie.

Analyse et résumé

Dans ce roman, George Orwell donne à voir à ses lecteurs une vie que peu d'entre nous serions capables d'imaginer. Comment vivrions-nous avec moins de cinq euros par jour ? (note : il s'agit là de francs ou de pounds de 1930, je ne suis donc pas sûr de cette estimation). Pour George Orwell, issu d'une famille bourgeoise, cette situation peut également sembler inconcevable ; il l'a effectivement vécue, cependant, et y a survécu. Comme beaucoup à cette époque, témoigne-t-il ; son œuvre nous permet donc de nous plonger dans un univers qui nous est presque inconnu ou que, secrètement, nous préférons tous ignorer.

Car du fait de son érudition et d'une certaine conviction qu'il ne s'agissait là que d'un état passager, qu'il allait trouver un moyen de s'en sortir, Orwell a vécu cette expérience presque en scientifique, et paraît fournir ici un témoignage à visée éducatif ; le style est généralement simple, certainement pas lyrique. Des faits sont narrés, des personnages décrits crûment, sans masquer aucun de leurs défauts mais sans leur nier non plus certaines qualités, et à quelques reprises, après chacune des grandes étapes du roman, viennent des réflexions de l'auteur.

La première concerne le travail dans les hôtels parisiens - qu'il compare à l'activité frénétique d'une fourmilière ; son roman se déroule avant les réformes sociales et la semaine de 35 heures, il décrit donc des journées de travail de seize heures tout au long de la semaine. Il révèle comment l'on est abusés dans ces mêmes hôtels, spécialement les plus chers où le cuistot palpe la viande dans tous les sens, la lèche, la lustre, la brosse, non pas pour qu'elle soit meilleure mais simplement pour qu'elle ait meilleure apparence. Il résume ainsi cette découverte : « Pour parler franc, plus on paie la nourriture cher, plus on est assurés de manger avec de la sueur et du crachat. »

La réflexion la plus intéressante, qui annonce certainement la suite de ses œuvres, est celle qui s'adresse, d'une certaine manière, aux autorités politiques : pourquoi est-ce que les vagabonds paraissent tenus d'errer systématiquement d'un refuge à un autre, tenus par une loi absurde à ne pas s'asseoir sur le pavé de Londres, condamnés à une errance improductive, quand ils pourraient être employés dans des sortes de fermes communautaires, des foyers où ils feraient pousser eux-même ce qu'ils pourraient manger ? Cette réflexion, ainsi développée, avec les précisions nécessaires - il faudrait bien entendu limiter les profiteurs et autres - paraît largement intéressante.

Dans ce roman, Orwell s'insinue petit à petit auprès des vagabonds et semble d'ailleurs trouver sa place parmi eux. Lorsqu'il décrit comment s'accommoder de sa condition misérable, il dit en anglais : '' One had to [..] '' ( que l'on pourrait traduire par '' il fallait '' ). Au cours de l'oeuvre, plus il s'imprègne lui-même de la condition de vagabond, il s'identifie de plus en plus à ces étranges personnes qu'il nous recommande de ne pas mépriser : il ne dit plus '' il fallait faire '' mais '' nous faisions ''.

Dans la dèche à Paris et à Londres est un roman qui apprend beaucoup sur les conditions de vie des plus démunis et fait réfléchir : sont-elles tant différentes hier et aujourd'hui, ou est-ce que George Orwell ne fait-il que décrire ici une réalité que nous nous efforçons tous de ne pas connaître ?

Citations

Principalement, un hôtel '' chic '' est un endroit où une centaine de personnes triment comme des diables pour que deux cent personnes puissent se saigner aux quatre veines pour des choses qu'elles ne veulent même pas réellement.

Un millionnaire n'est qu'un laveur vêtu d'un nouveau costume.

En pratique personne ne se soucie que le travail soit productif ou parasitaire ; la seule chose qu'on lui demande est qu'il soit profitable.


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